Dans son ouvrage, Paris : Capital of Fashion, l’historienne Valérie Steele affirme que « L’histoire de la mode de Paris est indissociable du mythe et de la légende ». En effet, quelques jours suffisent pour que Paris – maison-mère de la haute couture, ouvre les portes sur un monde où l’élégance, intouchable et fascinante, règne en maître. Suspension du temps, l’attention devient plus vive, l’exaltation se rapproche et le défilé peut enfin commencer.
Pour la première fois à Xiamen, Sun Ruixiang, artiste et photographe, présente un corpus de photographies, dont le sujet, la scène et les acteurs prennent formes pendant la Fashion Week à Paris. Dans le balbutiement des coulisses ou sous la caresse des projecteurs, les corps se déhanchent, s’expriment et se révèlent sous les traits d’une vague de noir et blanc ponctuée de couleurs où résident la beauté, l’éphémère et un cosmos de liberté.
Sun Ruixiang s’est infiltré entre les lignes, naviguant entre les défilés pour se rapprocher de ces figures angéliques qui enchantent les couvertures de magazine. De ce quotidien où le rêve est bâti d’idoles, les visages s’animent, les sourires se singularisent – traces de jovialité et d’autodérision. Les attitudes plus naturelles que jamais, transpercent l’image et se cristallisent dans des contrastes plus doux et délicats. A l’instar d’un détective, Ruixiang poursuit sa quête en capturant aussi bien la foule que les équipes et les photographes – personnages clés d’un univers éblouis sous l’euphorie. Le photographe a réalisé de nombreux portraits qui s’imposent par la présence déroutante des modèles photographiés – des êtres mis à nu par leur sensibilité et parfois empreints de mélancolie.
Réalisés entre 2007 et 2010, la quarante-cinq de photographies exposées ici, sont rassemblées en plusieurs chapitres, autour des défilés (The Show part I & II, Fashion as performance), des coulisses (Backstage : the real icons, fragments of life) et de portraits (The show part III : Eternal & forever).
Le défilé s’impose comme la catharsis d’un mythe qui explose, illumine puis s’évanouit dans les vapeurs, encore brûlantes de la performance. La photographie de Ruixiang se détache de toute approche formaliste ou documentaire, donnant corps à une série unique en son genre. Fragments d’histoires ou mise en scène d’une réalité qui nous échappe, ses œuvres constituent d’inlassables souvenirs, des confidences à la fois humaines et sociales. A l’abri des lumières, des fards et des stéréotypes, la vie est embrassée sans compromis, à fleur de peau.
Né à Shanghai en 1984, Sun Ruixiang est artiste, photographe de mode et vidéaste. Il collabore régulièrement avec des célébrités, de nombreux créateurs de mode et artistes de renom. En 2004, Sun déménage à Paris et commence à travailler comme photographe officiel pour Karl Lagerfeld et Chanel, capturant des moments uniques dans les coulisses et réalisant également un nombre important de reportages, éditoriaux et portraits pour Bazaar, Another et autres magazines de mode. De retour à Shanghai en 2012, Sun commence de nouveaux projets, explorant le portrait photographique et la vidéo expérimentale. Il continuera en parallèle d’exercer ses activités de photographe de mode, essentiellement pour Vogue Chine et Vogue Italie. Après avoir réalisé les portraits de citadins pendant plusieurs années, Sun Ruixiang se rend soudain compte qu'il observe toujours l'état intérieur d'autrui dans un espace clos. En 2018, il se rend au Yunnan pour observer les fleurs dans leur environnement naturel, cherchant à incarner un esprit plus ouvert, empreint de quiétude. En 2019, Sun reprend des études de cinéma à la New York. Nominé au Jimei Arles Discovery Award en 2020, quatre expositions mettront en lumière son travail photographique en 2021. En 2022, Il a accompli/achevé son premier court métrage experiemental en tant que réalisateur.
Commissaire : Mehdi Brit